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Mais que va devenir l’IRD ?


La fusion ne se pratique pas que dans les tokamaks
La Cour des comptes prépare le terrain à une internalisation par le CNRS.

Rue Cambon. 
Les rapports de la Cour des comptes passent rarement par quatre chemins et celui consacré à l’Institut de recherche et développement (IRD), paru début mars ne fait pas exception. Cet EPST, un des six français (voici la liste pour mémoire) et focalisé sur les « pays en développement », est aujourd’hui au cœur d’une réflexion sur son devenir.

Bons et mauvais points. Les sages de la rue Cambon égrènent ainsi les réussites de cet institut, notamment l’expertise du terrain de ses chercheurs. Mais pointe également ses échecs en termes peu amènes quoique courants dans ce genre d’audit. Deux exemples : la gestion de son patrimoine immobilier ou sa politique de valorisation.

Ils ne feront qu’un. Avec 855 chercheurs en son sein, cet institut très pluridisciplinaire (dont voici les missions) souffrirait donc d’une dispersion de ses moyens et d’un manque de visibilité, ce qui pousse les magistrats à demander son « rapprochement organique avec un autre opérateur ». En d’autres termes : une fusion avec le CNRS.

Bulles. Les fusions ne sont pas une exception dans le paysage français, comme celle de l’Inra et de l’Irstea, effective depuis le 1er janvier 2020. Dans ce cas déjà, l’absorbant et l’absorbé étaient de tailles très différentes. Dans le scénario privilégié par la Cour, l’IRD ne serait pas dilué dans le CNRS mais internalisé sous forme d’un institut.

Rien n’est fait. La recommandation de la Cour des comptes est claire, les réponses des tutelles le sont moins. Le Premier ministre estime que le CNRS est « peu familier des enjeux d’une recherche pour et avec les pays du Sud », le CNRS justement n’est « en rien demandeur » d’un rapprochement (mais propose des solutions au cas où), la direction de l’IRD craint logiquement une « dilution » de ses prérogatives.
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La visio autrement avec SpacialChat

 Papoter entre collègues, ça manque, non ? 

Avez-vous essayé SpacialChat ? Gratuit jusqu’à 25 personnes, cet outil de visioconférence est unique en son genre : chaque participant peut se déplacer dans l’espace virtuel (jusqu’à trois pièces différentes) et parler à tous ou en privé aux personnes autour de lui. Il est également possible d’afficher des images, Gif ou vidéos. Parfait pour les réunions, les présentations en petit nombre, des mini sessions posters ou même des pots de thèse virtuels !
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Interview

Ivan Oransky : « Récompensons les rétractations pour erreur »

Journaliste spécialisé dans le médical, Ivan Oransky a fondé Retraction Watch qui dénonce les méconduites et recense les articles rétractés.

Une rétractation est encore vue par les chercheurs comme une punition. Pourquoi ?

Lorsqu’un article est rétracté, leur carrière en est directement affectée : ils peuvent rater une promotion ou un financement, voire perdre leur emploi. Certains accusent la rétractation, mais le vrai problème est celui de l’incitation : on ne les pousse qu’à publier.

Comment inciter les chercheurs à admettre leurs erreurs ?

Nous pouvons les récompenser. En réalité, c’est le fonctionnement de la science qui est en cause. Les chercheurs devraient prendre plus de distance par rapport à leurs publications : par exemple, les rétractations pour erreurs pourraient être mentionnées comme un élément-clé du CV, à côté d’autres mentions comme « J’ai rendu mes données et mon code disponibles pour examen ».

Selon vous, le nombre de rétractations peut-il être un indicateur d’intégrité ?

Non, car le taux est encore trop faible – beaucoup plus de papiers devraient être rétractés. En utilisant le taux de rétractation comme indicateur, on risque de punir les revues, les universités et les chercheurs. Cependant, le taux de rétractation reflète également la régulation d’un domaine de recherche et donc une progression de l’intégrité.

Les sciences de la vie sont-elles plus affectées que les autres domaines ?

En valeur absolue et sans tenir compte d’autres facteurs, c’est une statistique dénuée de sens. Les sciences de la vie produisent plus d’articles et retiennent davantage l’attention, en partie parce qu’elles peuvent avoir un impact direct sur la société. Et des personnes comme Elisabeth Bik font un excellent travail pour trouver des fraudes dans les publications en sciences de la vie. Bien sûr, si vous les passer au crible, vous trouverez plus de cas.
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Actualité

La vertu à portée de main


La vertu n’est pas un luxe, contrairement à ce téléphone.
Les rétractations : punition ou preuve d’intégrité ? On fait le bilan sur leurs occurrences et leurs causes.

L’ampleur des dégâts. La rétractation survient dans un cas sur 2 000, si l’on considère les 25 000 recensées par Retraction Watch, rapportés aux 50 millions de publications existantes. D’après l’Observatoire des Sciences et Techniques (voir la note en annexe de ce rapport), il s’agirait plutôt d’un sur 6 000.

Pas une semaine sans rétractations. Ce lundi, le blog Rédaction Médicale revenait sur le cas d’un plagiaire multirécidiviste qui fait maintenant partie des recordman français de la rétractation. Mais au-delà de cas particuliers souvent spectaculaires, beaucoup s’accordent à dire que le système est en cause, plus que les individus.

A l’insu du plein gré. La rétractation n’est en général pas une démarche volontaire. Si un quart provient d’erreurs involontaires (« honest errors »), une bonne moitié consiste en de la fraude ou du plagiat généralement dénoncé par un tiers. L’exemple de la prix Nobel Frances H. Arnold qui avait demandé la rétractation de “son” Science est un fait rare (et salué).

« La rétractation est perçue comme une punition, alors qu’elle devrait être vue comme une action vertueuse »
Hervé Maisonneuve, Rédaction Médicale

Champions du monde. L’Iran et la Chine trônent en tête du podium, la France se place dans la moyenne européenne (toujours d’après l’OST), avec 389 rétractations recensées sur Retraction Watch. L’emblématique affaire Olivier Voinnet imprègne toujours nos esprits, avec huit articles rétractés et plus de vingt corrections pour fabrication de données et quelques “erreurs honnêtes”.

Les fraudeurs, tous en bio ? Les nombreux scandales qui ont éclatés dans ces disciplines peuvent le laisser penser : de fait, les taux de rétractation y sont dix fois plus élevés qu’en informatique, toujours selon l’OST. Mais toutes les disciplines sont touchées, rappelait Michelle Bergadaà. Plus de rétractions ne signifie pas nécessairement plus de méconduites mais aussi plus de détection.

Prime à l’honnêteté. Malgré le mea culpa d’Olivier Voinnet, le malaise reste perceptible, en France comme ailleurs, lorsqu’on parle de rétracter un article. « La rétractation est perçue comme une punition, alors qu’elle devrait être vue comme une action vertueuse, notamment de la part des éditeurs », déclare Hervé Maisonneuve en faisant référence au « Lancet gate » de juin dernier.

L’idéal de vertu ?  En cas de rétractation, publier un second article corrigé est essentiel afin de ne pas laisser planer de doutes sur les conclusions de l’article rétracté.
Les rétractations, un indicateur d’intégrité ? 

Il y a un paradoxe : le nombre de rétractations reflète à la fois des manquements à l’intégrité mais peut aussi être le signe d’une surveillance accrue… et donc devenir un indicateur d’auto-régulation. Un rapport de juin dernier sur l’intégrité — produit par l’inspection générale de l’ESR — recommandait de « publier annuellement, en tant qu’indicateurs d’activité (et pas d’efficience), des données (…) sur les rétractations ». Cette mission serait confiée à l’Office français de l’intégrité scientifique (Ofis), qui vient de se choisir une nouvelle directrice. Affaire à suivre.
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Actualité

Papyrologues, comptez-vous !


Nous, on vous appelle les oiseaux rares.
Le ministère a lancé son enquête sur les disciplines rares.

Au rapport. Contrairement à l’Allemagne, qui a pris le problème à bras le corps (germanophones uniquement), la France n’a que peu de données sur la répartition fine de ses chercheurs. Pour réparer cela, le ministère a mis sur pied une enquête sur ces « disciplines rares ».

Faux départ. Avec quelques semaines de retard sur le calendrier annoncé, le questionnaire est enfin accessible sur le site du ministère. Et les courriers à destination des présidents d’université et d’instituts devraient partir dans les prochains jours. On vous tiendra informés.

Vieux sujet  Ce projet est soutenu par les présidents d’université (l’ancien président de la CPU a signé un rapport en 2014) et sept autres institutions. Mais au-delà de la production de données, la vraie question sera celle de l’allocation des moyens.
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Interview

Jacques Lewiner : « Le basculement a commencé »

L’analyse d’un secteur toujours fécond par Jacques Lewiner, spécialiste de l’innovation.

A l’avant-garde depuis toujours la microfluidique a déjà vingt ans, d’où vient-elle ?

La microfluidique est effectivement née il y a une bonne vingtaine d’années sous l’impulsion de quelques pionniers aux USA. La France a très vite été bien placée grâce à des chercheurs comme Pierre-Gilles de Gennes et de son intérêt pour la matière molle [en voici une définition, NDLR]. Compte tenu des très petites quantités de fluides manipulées, il fallait adapter les lois bien établies de la mécanique des fluides. C’est aux USA il y a plus de dix ans qu’ont été lancées les premières start-up, à Harvard, Stanford ou Princeton, une époque où il y avait encore de nombreux obstacles sur la route des chercheurs entrepreneurs en France.

Pourquoi cet engouement ?

Très vite, on a compris que cette capacité à déplacer de petites particules ouvrait la voie à de nombreuses applications. On peut créer une gouttelette dans un fluide porteur et y inclure ce qu’on veut (un virus, du parfum, de la peinture, etc.). Pour la recherche sur les médicaments, on utilise des robots qui testent de nouvelles molécules à raison de quelques échantillons par seconde. Si on utilise des gouttelettes entraînées dans un petit canal, on peut traiter des milliers d’échantillons par seconde ! Le gain en temps ou en quantité de matière est énorme… et les coûts sont diminués.

Quel avenir lui prédisez-vous ?

La microfluidique va à coup sûr se développer. Le basculement a commencé à se faire avec des ”big pharma“ qui regardaient cela de loin jusqu’à présent mais investissent maintenant le secteur. Des start-up se sont développées, par exemple Fluidigm, Capsum, Fluigent et bien d’autres. Une nouvelle technologie met toujours un peu de temps à s’imposer mais une innovation qui apporte des avantages objectifs est vouée à réussir, surtout si son impact environnemental est positif ce qui est le cas avec la microfluidique.
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La microfluidique sort de l’adolescence

Les applications se multiplient dans des domaines parfois insoupçonnés.

Laisse venir l’avenir. Dès son origine, deux voies de recherche coexistaient sans forcément communiquer beaucoup : académique d’une part, industrielle de l’autre (peinture en spray, imprimante à jet d’encre…), rappelle George Whiteside. Aujourd’hui se développent plusieurs voies :

 Les analyses biologiques  C’est l’espoir historique de la microfluidique : pouvoir analyser un prélèvement de petite taille. L’innovation est toujours très active dans ce domaine et arrive au stade de la production : Adelis et Inorevia, Stilla technologies, par exemple. 

– L’énergie bleue  Beaucoup plus fondamentale, cette voie consisterait en substance à récupérer de l’énergie grâce à de l’eau salée : la puissance osmotique. On parle cette fois de nanofluidique. Une start-up pour l’exemple : Sweetch.

La  2D, c’est has been  L’application la plus en vogue en ce moment sont les organes sur puce (voici une liste de sociétés): avec des intestins de 1 mm², le gain de temps et de réactifs est énorme. Et demain, les corps sur puces ? On y va tout droit
Un trombi non exhaustif  

Le pionnier.  Les travaux du chercheur touche-à-tout George Whiteside (Harvard) sont considérés comme fondateurs de ce qui ne s’appelait pas encore la microfluidique. Son laboratoire a préparé le terrain à de nombreuses applications, parfois développées par d’autres.

Le visionnaire. George Manz est un chercheur suisse qui a œuvré toute sa carrière entre l’industrie et l’académie. Il est le premier à avoir théorisé le concept de laboratoire sur puce (“lab on a chip”) depuis les années 90, peu après son doctorat à l’EPFL de Lausanne.

Le passeur. Les travaux de Pierre-Gilles de Gennes (prix Nobel de chimie 1991) sur la matière molle (voir interview)  ont pavé la voie à la microfluidique en France. Un institut consacré au sujet, et portant son nom, plaque tournante du domaine a été créé en 2010.

La scandaleuse. 9 milliards de dollars, c’était la capitalisation de Theranos juste avant sa chute. Dirigée par Elisabeth Holmes, cette start-up voulait révolutionner le secteur de l’analyse sanguine grâce à la microfluidique. Il s’agissait d’une escroquerie résumée dans ce livre.

La startuppeuse. Avec au départ la même promesse que Theranos — réduire la quantité de sang nécessaire pour une analyse —, la société Fluigent dirigée par France Hamber commercialise du matériel destinée à ces analyses microfluidiques.